L’exposition à des bruits prolongés affecte le bien-être général, notamment l’humeur, le sommeil et parfois le comportement alimentaire. (Source : IFOP). Pourtant, quelle que soit l’énergie que l’on mette sur le sujet, les messages sur les dangers du bruit et l’importance de la prévention ont du mal à passer. Pourquoi et comment contourner cette résistance ?
Le bruit en quelques chiffres
Dans le domaine privé ou personnel, 15 à 18 millions de personnes souffrent d’acouphènes (= sifflements, bourdonnements) dont 3 à 5 millions* de moins de 35 ans avec des effets permanents. Parmi les raisons, on note souvent des niveaux sonores élevés lors d’événements sportifs et festifs.
Au travail :
- 62 % des actifs se disent gênés par le bruit au travail contre 52% en 2023 et 49% en 2121. Cela impacte tous les âges et tous les secteurs : 83% dans le BTP construction, 72% dans l’industrie (72%), 62% dans l’administration, 58% dans les services, 55% dans le commerce !!
- Plus d’un quart des personnes indiquent que le bruit au travail impacte leur vie privée.
- 73% ont une répercussion sur leur santé (audition ou autre).
Pour un rappel sur les grands principes du bruti au travail : maîtrisez les niveaux sonores pour mieux évaluer les dangers.
Les conséquences sur bruit sur la santé
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Fatigue, lassitude, irritabilité (60%)
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Stress (50%),
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Trouble du sommeil (33%),
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Acouphènes (32%)
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Hypertension artérielle (22% soit plus d’une personne sur 5)
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Facteur aggravant dans le risque de burn-out.
Si la prise en charge s’est améliorée, il est à noter que les acouphènes et l’hyperacousie, bien que facteurs aggravants en cas de surdité professionnels, ne sont pas reconnu comme des handicaps invisibles invalidants.
Les sources de bruit dans l'entreprise
- bruit provenant de l’extérieur des locaux (20 %),
- conversations entre collègues (15 %),
- matériels comme les imprimantes, etc. (15 %),
- allées et venues de personnes (12 %),
- conversations téléphoniques ou en visioconférences (11 %).
Chez les artisans, ouvriers, travailleurs agricoles, de l’industrie ou du BTP, le bruit généré par les matériels, outils et machines arrive en tête.
Les freins culturels à la prévention du risque bruit
En France, le bruit est perçu comme un mal incontournable avec lequel il faut vivre. Se faire tester n’est pas naturel bien que le pourcentage soit en hausse chez les personnes gênées par le bruit au travail (50%). Ce fataliste est renforcé par une image négative face à une personne avec des problèmes d’audition :
- Signe de vieillesse,
- Risque de ne plus être apte (problème d’audition associé trop souvent à l’image d’une personne sourde et muette)
- Peur d’être stigmatisé et mis de côté, de ne plus se sentir capable de faire son travail.
Rajoutons que les conséquences ne sont visibles que tardivement et tout est en place pour que chacun pense qu’il n’y a pas urgence ou besoin de protéger ses oreilles. « On n’en meurt pas ! » donc on peut vivre avec et … il existe des moyens pour compenser ce handicap le jour où il sera là. De ce fait, le problème est souvent pris très tardivement, lorsque la perte auditive est telle que suivre une conversation devient difficile.
Au travail, les raisons invoquées par les salariés face à leur exposition au bruit sont principalement la nature même de l’activité (46 %), l’organisation de l’espace de travail (48 %), la culture de l’entreprise (40 %) et enfin “l’absence de prévention” (39 %).
Quant aux raisons invoquées pour l’absence d’utilisation des protections auditives, on notera deux grandes justifications :
- Nécessité (ou habitude ?) d’utiliser son ouïe pour travailler (repérer une panne dans un moteur par exemple…) pour certains métiers techniques
- Sentiment qu’il n’est pas possible d’avoir une conversation correcte et compréhensible en portant des protections.
Pourtant, les études montrent bien que chacun comprend aujourd’hui qu’il y a un risque et que les conséquences sont irréversibles. Malgré tout, une personne qui ressent une gène auditive mettra en moyenne 7 ans avant de consulter… Pourquoi ? Par peur du diagnostic. Il faut donc changer nos méthodes de communication et d’information pour mettre en avant les bienfaits et avantages plus que les dangers et conséquences.
Pourquoi la prévention du risque bruit reste-t-elle insuffisamment efficace ?
Tout ce qui tourne autour de la prévention du bruit est vécu comme une contrainte et manque dont de sens et d’intérêt pour les personnes concernées. Concrètement, on constate :
- Un manque d’information sur les impacts du bruit sur la santé en général
- Une communication insuffisante
- L’absence de politique RH
- Un environnement naturellement bruyant
- Une résistance au changement de certains collaborateurs
Adapter la prévention au risque bruit
Voici quelques pistes conseillées par les organismes en charge de la prévention :
- Trouver un équilibre dans la communication pour indiquer la gravité des conséquences sans faire peur :
- Ce n’est pas que du confort
- C’est un besoin physiologique de l’oreille,
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C’est une question de santé (auditive mais aussi mentale et globale) car même au-dessous de 80dB si l’on ressent une gêne il y a fatigabilité, stress… donc jouer sur la santé mentale,
- Former : conférence, atelier, webinar, animations ludiques, dépistages, dépliants… pour provoquer une modification des comportements,
- Renforcer les campagnes de dépistage auditif,
- Intégrer le bruit aux valeurs de l’entreprise (que ce soit QVT, handicap et/ou sécurité),
- Utiliser le DU pour mettre en place des actions de réduction du bruit,
- Mettre en place des indicateurs de suivi (mesurage du bruit, affichage, dépistages, port effectif et continu des PICB) par exemple dans le cadre de la RSE,
- Pourquoi pas, dans un premier temps proposer une bonification ou un challenge bruit sur une durée suffisamment longue pour que les personnes réalisent les bienfaits du port des EPI et sortent du sentiment de contrainte ? Ce type d’approche peut avoir un effet domino grâce aux personnes convaincues et créer une bienveillance entre collègues pour se sensibiliser,
- Promouvoir la veille collective en incitant chacun à être vigilant et à faire des rappels à ses collègues,
- Et bien entendu, fournir des EPIs, si possible variés pour permettre un choix et un confort optimal.
Quelle prévention dans le secteur tertiaire, les bureaux et les services ?
Dans les bureaux
- Limiter autant que possible le nombre de personne par bureau ou par open-space, si nécessaire, installer des cloisons absorbant le bruit.
Éloigner des lieux de travail les matériels bruyants : imprimante, machine à café, etc. - Dédier des espaces au silence et d’autres au bruit (par exemple, un espace pour discuter ou ou téléphoner ou des lieux pour les discussions informelles).
- Régler les sonneries de téléphone et les alertes sonores des ordinateurs sur un niveau raisonnable.
- Recourir à des matériaux absorbant le bruit, au sol bien sûr (moquette ou revêtement dans les zones de circulation) mais pas seulement : des bibliothèques garnies de livres, des fauteuils en cuir ou en tissu, des plantes vertes contribuent aussi à absorber le bruit.
En télétravail
- Proposer des casques car ils disposent d’optimisations sur les fréquences de la parole et facilitent la compréhension
Dans la vie privée
- Varier les supports pour écouter de la musique,
- Faire des pauses auditives (5 à 10’ toutes les heures) pour reposer les oreilles,
- Utiliser des protections auditives (festival, cinéma…)
- Rendez-vous aux stands de l'association de l'audition "nos oreilles on y tient"
En complément, pour aller plus loin
Baromètre 2024 - bruit au travail
Association nationale de l’audition
Bon de dépistage gratuit : https://association-nationale-audition.org/wp-content/uploads/2025/02/Bon-depistage.pdf